Noël de la Grande Famille
Le Noël de la Grande Famille ! C’est le choix de la Rencontre sous un ciel rougeoyant. C’est le choix des illuminations de Noël, quitter la fée électrique pour s’abandonner dans le rougeoiement d’un coucher de soleil. Poser les yeux sur un feu et le crépitement du bois, écouter cette musique et la préférer aux braillements d’une sonorisation cachée, dans les branches maigres des platanes décharnés d’Aix-en-Provence. C'est échapper aux miroitements des guirlandes pour juste déguster un verre, entre amis dans le silence du crépuscule. Regarder la lumière du jour disparaître lentement. Admirer cette guirlande de lumière glisser doucement derrière une montagne et s’éteindre, la voir passer d’un jaune solaire, à l’ambre au rouge glaçant d’une nuit d’hiver. Aucune froide guirlande de noël ne pourra remplacer cette magie d’un coucher de soleil, la chaleur de cet instant éphémère.
Plonger au cœur de la nature charnelle et abondante, et fabriquer sa propre bûche de noël. Suer dans le froid d’une forêt pour obtenir cette récompense. Ce dessert primé jugé indispensable à tout repas. Faire son marché de… noël… au milieu du végétal. Balader au milieu de la forêt, et une scie à la main, caresser le bois comme on gouterait l’ingrédient indispensable. C’est faire son choix au milieu des stands, de ses branches tendus vers soi, tels des bras squelettiques dépourvus de feuilles désireuses d’accrocher le curieux, de lui vendre sa camelote. Et là, tomber sur la bonne bûche, caresser le bois, vérifier qu’il est bien mort, qu’aucune pousse ne fera regretter de l’extirper du sol,de vitrine. Pas de porte-monnaie, uniquement des dents bien aiguisées. Plonger sa scie dans le bois trempé par la pluie précédente, et tranché dans la chair. Acquérir la bûche qui nous permettra de tenir toute la nuit. Sa chaleur salvatrice nous tiendra éveillée et nous enveloppera de sa douceur.
Le noël de la grande famille, c’est aussi le temps d’une truffade de noël… Une aventure, l’histoire d’une transmission ? Une histoire mystérieuse que les auvergnats se transmettent autour du feu, un verre de vin de chaud à la main… Ils racontent que la truffade de noël fut transmise au Sud dans un élan de fraternité par une certaine Paulette quelques jours avant les fêtes. L’Occitan était désespéré : du vin, des huîtres, pas de plat de chaud pour réchauffer les cœurs. Pas d’aïoli, en cette saison des frimas. Ils lancèrent un appel à l’aide. L’Auvergne répondit présent. En ces jours de froid, le périple était grand, la tempête menaçait d’une scission entre le nord et le sud et l’impossibilité de voir arriver le précieux paquet, nécessaire aux festivités. Tous les éléments étaient contre l’Auvergne, leur volonté de fraternité. Depuis des jours, le ciel déversaient ses larmes au creux des vallons et remplissaient les vallons de son sel, les eaux recouvraient les ponts. Depuis un mois, la voix des grévistes emplissaient les hauteurs, et empêchaient de passer par les voies de l’air, réclamant plus de respect des droits, en temps de gel des solidarités. Face à toutes ses adversités, blanc et innocent, le fromage fut bien emballé dans un colis et confié à la poste. Le fromage quitta le cœur des volcans. Il devait convertir le sud aux bienfaits de l’Auvergnat. Le postier compréhensif fut emballé par cette noble mission, malgré la période troublée, et les périls du voyage. Il devrait transmettre à un italien chauve son précieux colis uniquement contre le mot de passe « Mozzarella ».
Qu’en déplaise aux auvergnats roux qui essaient proposer d’une autre version : jambon, comté…. Ils peuvent toujours pisser dans leur violon, les termes en avaient été définis et se perpétuent ainsi…. Mozzarella contre cantal…
Dans tous les cas, il serait bien arrivé à bon port… dans une poêle plongé au milieu d’ails et de pommes de terre… Là encore, la transmission dit que les couteaux volèrent et que les langues acérèrent les lames… Cuite ou crue les pommes de terre dans la poêle ? Les laguioles restèrent fermés et les langues sous l’effet du vin de se délièrent, la poêle chanta et réconcilia les âmes. Le cantal lia la pomme et l’ail comme l’amitié liée les cœurs et l’Auvergne triompha des tensions. Les bouchons de rhum circulèrent et les cadeaux distribués.
De la truffade, il n’en resta rien que les cœurs occitans peuvent encore chanter de son goût et de son accueil.
La bûche remplit son office, et la harpe au matin chanta au gré du vent l’hymne et de la renaissance du jour après la nuit la plus longue de l’année.
Hervé